Carnet de route

LE TAILLEFER
Le 10/03/2012 par ROSSETTI Magali
10 mars 2012,
Le Taillefer....oui, mais par le Pas de la Mine!! Quelle idée de programmer une telle sortie sur un site et un passage qui ont fait la une des journaux il y a de cela un peu plus d'un mois (Extrait du Télégramme.com: "Un skieur de randonnée confirmé de 42 ans, emporté lundi par une avalanche, a certainement eu la vie sauve grâce au sang froid de sa compagne. La jeune femme équipée d'une pelle a réussi à libérer son compagnon du piège neigeux dans lequel il était enfermé et à le mettre à l'abri du vent le temps d'aller prévenir les secours. "Il a eu beaucoup de chance", avouent les secours, précisant toutefois "une chance provoquée" par le bon équipement et la bonne préparation des skieurs. ")
AMBIANCE..... mais les participants ne semblent pas tous être au courant de cet accident.
Le Pas de la Mine est un court passage technique et souvent avalancheux car exposé au vent. Il permet d'accéder aux pieds de la Croix du Sergent Pinelli et au vallon qui mène au Taillefer.
J'espère que le Pas sera en condition, pas chargé et plutôt en neige dure. Mon voeu est exhaucé. Le Pas est bien tracé et nous permet de sortir les crampons et le casque qui s'ennuyaient terriblement dans les placards! Eric fait donc ici sa première expérience en crampons....je jubile en voyant que notre grand mangeur de dénivelé semble un peu crispé dans le passage clé du Pas!!! Et oui, on peut ne pas être un champion de tout! Il se débrouille cependant comme un chef.
Le groupe se scinde en deux. Les filles d'un côté, les garçons de l'autre! Laure et moi prenons l'itinéraire des crêtes par la Croix Pinelli. Je veux y repérer le couloir nord....qui s'avère un peu trop caillouteux à mon goût. Un charmant jeune homme qui a suivi Laure jusqu'à la Croix partage mon avis pessimiste sur ce couloir nord. Je poursuis sur les crêtes. laure prend un peu de retard....partagée entre l'envie de me suivre et l'envie de suivre le jeune homme qui redescend???? Doum et ses gars ont opté pour la combe de l'Emay. Nos deux itinéraires nous font gagner le pied du Taillefer en même temps. Reste l'ultime étape, l'ascension de la pente qui mène à l'arête SW du Taillefer. Et bien que tout le monde soit bien entamé (1450 m de dénivelé tout de même!), cette dernière épreuve va être bien éprouvante!!! Doum est en tête, je le suis de près (puis de loin!) avec Eric à mes trousses, motivé pour parfaire sa technique de conversion!!! Tout le savoir-faire de notre petite troupe y passe! Installation des couteaux avant la pente raide (pour ceux qui anticipent!) ou alors en pleine pente gelée (pour ceux qui n'anticipent pas!), conversion sur glace dure (pour ceux qui ont la tête dans le sac et qui ont perdu la trace qui passe par la neige plus molle!), dérapage contrôlé (pour ceux qui maîtrisent) ou pas (pour ceux qui glissent en pleine conversion!)..... ou alors grimpette en crampons, skis sur le sac, pour notre Laure qui est vraiment accro à l'alpinisme!
Eric découvrira avec étonnement qu'il est effectivement possible d'avoir la spatule du ski sous le nez en pleine conversion quand cette dernière se fait dans une pente à l'inclinaison vraiment, vraiment, vraiment RAIDE!
Mais malgré cette ultime difficulté, tout notre petit monde arrive sur l'arête avec joie et bonne humeur.
Eric et moi gagnons le sommet où nous attend une vue splendide, peut-être l'une des plus belles vues panoramiques du coin du mont Blanc à l'Obiou, en passant pas la Meije et le Grand Ferrand.
Il est temps de redescendre car le vent glacial nous rappelle que les estomacs se creusent à cette heure-ci (12h00). Nous rejoignons la Combe de l'Emay en skiant une neige des plus étonnante, désagréable et trop travaillée par le vent, tantôt glacée, tantôt poudreuse du fait des accumulations créées par le vent. Un beau coin d'herbe ensoleillé sera le lieu de notre déjeuner. Nous regagnons ensuite le pas de la Mine, re-crampons, re-piolet et re-casque. La neige s'est ramollie et le passage se fait plus facilement.
La descente par la Côte des Sallières est jubilatoire! La neige est très skiable mais trompeuse. Entre passages durs, accumulations de poudreuse et grosse soupe infâme, il faut jouer sur l'orientation de la pente pour trouver les meilleurs coins. On s'amuse de cette neige joueuse, on se marre à la vue des chutes des copains, on se régale à pouvoir enquiller quelques "S" esthétiques...ou non!
Le clou du spectacle nous attend dans la forêt où l'unique trace de descente nous plonge dans ce que l'on appelle le Boarder Cross, à cette seule différence près qu'ici, le boarder cross est bordé de SAPINS!!!
Et je me marre souvent en me remémorant les débuts de notre Cricri qui nous maudissait à chaque boarder cross rencontré. Mais aujourd'hui, il maîtrise. Il n'est plus un débutant! Sa descente dans les bois en est la preuve. Il zigzague aisément entre les arbres, les vernes et tous les obstacles qui se dressent sur son chemin, fier de réguler sa vitesse pourtant incontrôlée il y a de cela à peine quelques années!
Cependant.....Cricri...dans un moment de grand relâchement.... là où la forêt ne gêne pourtant plus la liberté de mouvement des skieurs....
Cricri arrive de tout son élan...visant un espace libre et vierge de toute trace aux côtés de Doum arrêté là à l'admirer dans son style élégant de skieur accompli... Cricri loupe son arrêt tant prémédité, car l'arrêt en question se fait plus tôt que prévu dans cette neige vierge qui est en fait bien plus profonde que celle qui guidait les skis de Cricri à peine deux secondes auparavant....
Il fait alors un "Stop and Go" comme on dit en triathlon, un arrêt net suivi d'un départ ou plutôt ici d'un vol plané rapide dans une figure de 360 qui se termine dans un sapin volumineux, accroché aux branches dudit arbre par ce fichu piolet mal attaché au sac à dos, mais pourtant bien enlassé dans le sapin qui lui-même se demande bien comment il est possible de se prendre un skieur ici, alors que lui, dans sa prime jeunesse, avait fait exprès de pousser ici, en dehors du boarder cross et à l'orée de la forêt!
Comme à mon habitude dans ce genre de situation, je ne peux cesser de rigoler et ne peux aider notre pauvre Cricri emmêlé dans le sapin. Doum s'en charge et nous repartons tranquillement jusqu'au parking où nous attend la voiture, mais surtout les bières bien méritées que j'avais apportées.
Merveilleuse journée avec tout ce qui fait un groupe d'enfer: la bonne humeur, l'envie d'arriver au sommet et de gravir ces 1450 m de dénivelé et surtout l'amitié qui règnait au beau milieu de ces paysages féériques que nous a offert la montagne ce jour-là.
Magali ROSSETTI